17 octobre 2019

Kurdistan : La solution Erdogan – Edito lettre n°56

Par Julien Dray


L’orient est compliqué depuis toujours. Rien n’est donc simple dans cette région. On le sait. Mais ce qu’il se passe est d’une gravité extrême et risque de compromettre pour longtemps l’équilibre du monde.

Les Kurdes de Syrie, sous la direction des YPG, ont été, dans la guerre contre le terrorisme, les acteurs déterminants. Ils ont permis d’affaiblir durablement un mouvement né de l’inconscience de certains pays. Ils ont donc participé à affaiblir le radicalisme islamique qui se développait extrêmement rapidement (rappelons nous la prise de Mossoul). Cela mérite pour le moins, le respect et la reconnaissance.

Monsieur Erdogan ne l’entend pas ainsi ! Les Kurdes étaient et restent une tache en Turquie, comme en Syrie, qu’il faut effacer. Son régime totalitaire se livre à une opération militaire pour soumettre les kurdes et redorer un blason terni ces dernières années.

L’évidence devrait amener ceux qui en ont le pouvoir à empêcher ce projet, à arrêter cette main criminelle…et pourtant !

On se presse, dans le monde diplomatique… de détourner les yeux, de verser des larmes de crocodile, d’aller de réunion en réunions, de proclamer de fausses menaces, d’être dans la posture. Tout cela ne servira à rien !

L’émoi populaire suscité ne trouve aucun relais dans les décisions des gouvernements

Monsieur Erdogan réalise son rêve. Ecraser les Kurdes.

La seule déclaration de Sibeth Ndiaye en France est loin d’être anodine : « Evidemment que nous sommes inquiets par rapport à ce qui pourrait se passer et c’est la raison pour laquelle nous souhaitons que la Turquie (…) termine au plus vite l’intervention qu’elle a commencée, que nous avons évidemment condamné ». « …termine Au plus vite… » dit elle. Même en la condamnant il semble que cette invasion turque gênerait davantage dans sa durée que dans son ambition. On parle pourtant d’un massacre. Cette déclaration résume assez bien la crainte de nombre de chancelleries : Etre mis en face d’une l’accusation ; complicité par passivité.

Il y a longtemps que le pouvoir turc soutient des fractions djihadistes.

Depuis la révolte du Printemps arabe et le début de la guerre en Syrie, il a participé au développement de ces mouvements militairement et financièrement. Les djihadistes ont servi leurs maitres, se sont formés à leurs frais, ont aidé à écraser la révolte en Syrie… jusqu’à créer une formation politique radicale : DAESCH ! bien utile commercialement à la famille Erdogan.

Dans le même temps, Le pouvoir de Bachar el assad s’effondre dans les territoires à population kurde de la Syrie. Cela conduit à la prise de pouvoir d’un front démocratique à l’initiative des YPG. Erdogan ne l’accepte pas. Pour des raisons stratégiques et pour des raisons politiques. Il envoie alors les troupes de DAESCH à l’assaut de ces territoires « libérés ». Le siège de la ville de Kobané devient le symbole de cette offensive éradicatrice.

DAESCH a bien été défait grâce au Kurdes. Il subsiste néanmoins des fractions hébergées et protégées par les Turcs au nord de la Syrie. Ce sont aujourd’hui ces djihadistes qui, sous commandement turc, combattent les Kurdes sur le terrain pour anéantir le Rojava libre.

Erdogan profite de la faiblesse du monde entier, du cynisme immonde du président Trump et de la lâcheté des Européens, pour assouvir son rêve, au risque de reconstituer un monstre dont on se croyait libéré.

Les Kurdes, qui ont payé un lourd tribut dans la guerre contre DAECH, vont être sacrifiés par les restes de ce mouvement avec l’appui, le soutien, la force militaire de la Turquie.

Dans ce contexte, Il ne suffit plus de condamner de loin mais d’agir vite et au plus près !

Le chef d’état major des forces kurdes le dit simplement : « si vous n’êtes pas capables de nous défendre ou de nous protéger directement alors aidez nous ! en rendant le ciel de la Syrie inviolable »…. Ce n’est pas difficile à faire à ce stade. Il suffit de le vouloir pour les Etats Unis comme pour l’Europe.

Si cette décision n’est pas prise dans les jours qui viennent alors Les Etats Unis , l’Europe et surtout la France seront les complices objectifs de M. Erdogan…

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