28 septembre 2020

Faire face à l’affaissement démocratique – Edito lettre n°95

Par Julien DrayDaniel Goldberg

Peu à peu, de dérapages politiques plus ou moins contrôlés en polémiques quasi journalières enchaînées sur les plateaux télévisuels et les réseaux sociaux, notre pays sombre dans un no man’s land politique dont personne ne peut prévoir l’issue.

E. Macron n’en est pas seul responsable : la crise politique couvait avant lui et nous avions connu déjà de forts soubresauts, entre le choc du 21 avril 2002 et le « Non » au référendum de 2005, dont n’ont pas tenu compte les dirigeants français dans les faits.

Avec les quinquennats de N. Sarkozy et de F. Hollande, pour des causes différentes et sans les mettre sur le même plan, elle s’est aggravée. Et, en cela, E. Macron a « pris sa chance » en surfant dans sa campagne sur le « rejet du système », comme tout bon populiste qu’il condamne par ailleurs. Il a ainsi affaibli un peu plus et d’un même geste les partis politiques, certes déjà largement désavoués, les élus locaux, les syndicats et les associations, bref tous les corps intermédiaires qui font que la société tient dans son ensemble. Par la suite, sur fond de choix de ruissellement dépassés, il a engagé la confrontation avec les Gilets jaunes, puis sur la réforme des retraites. Il tient là sa part dans cette situation dangereuse.

Alors bien sûr, la droite qui s’est renforcée aux élections municipales, et par là-même au Sénat, les écologistes qui ont réussi une percée, essentiellement dans les centres urbains, et les socialistes qui ont sauvegardé l’essentiel et participé dans de nombreuses villes à des reconquêtes au sein des coalitions de progrès, chacun trouve à se satisfaire des échecs répétés de LREM depuis 2017. Et les Insoumis, persuadés que leur heure viendra, tentent de contenir à leur avantage le bouillonnement social.

Mais, aujourd’hui, aucune de ces forces politiques symbolisant une quelconque alternative à E. Macron ne semble en mesure de l’emporter en 2022, ni même de figurer au second tour. Et aucune de ces victoires locales n’engendre la moindre dynamique nationale.

En ce sens, les élections départementales et régionales du printemps prochain seront plus qu’un galop d’essai. A force de mobiliser dans le désert pour essayer de convaincre les 20 à 30 % du corps électoral qui se déplace encore pour voter, il serait peut-être temps de réfléchir concrètement à écouter et à parler aux 70 % qui, maintenant de manière quasiment militante, se détournent du débat public.

Dis autrement, la gauche et les écologistes ne peuvent gagner et gouverner durablement le pays dans un contexte de défiance démocratique exacerbée. Il nous manquera toujours le souffle pour aller chercher une « vraie » victoire et la force de gouverner dans la durée.

De deux choses l’une : soit cette fracture démocratique intéresse et il faut que les différents acteurs réfléchissent ensemble aux moyens d’y remédier, soit, finalement, chacun s’en satisfait et la juge sans retour, et nous pouvons alors continuer à gérer nos pré-carrés locaux, avec une offre nationale bien loin de la transformation sociale, écologique et citoyenne dont beaucoup se réclament.

L’unité de la gauche et des écologistes est le carburant d’un nouveau projet socialiste


En ce sens, la recherche de l’unité entre la gauche et les écologistes n’est pas qu’une martingale électorale par temps de disette citoyenne. Il ne s’agit pas seulement, même s’il est vrai que c’est déjà beaucoup, de la condition nécessaire pour espérer figurer au second tour des différents scrutins, et donc de peut-être pouvoir l’emporter.

Non, l’unité, sa recherche, sa construction, est le carburant d’un nouveau projet socialiste. D’abord pour dire ce que doivent être les Nouveaux Socialistes, débarrassés de leurs turpitudes d’hier, mais toujours fiers de leur ancrage social au bénéfice des classes populaires et des classes moyennes : un nouveau projet qui réponde au besoin de protection des salariés et des artisans de notre pays.

Cette union doit se traduire dans un contrat de gouvernement qui montre en quoi les différentes sensibilités sont prêtes à s’accorder pour conduire le pays. C’est un moyen pour redonner confiance dans la parole publique en disant concrètement le comment de ce qui se passerait si nous gagnons. Il n’est plus temps d’aligner des propositions si nous ne donnons pas le chemin pour y arriver. C’est la condition d’un dépassement sans effacement du Parti Socialiste, en direction de toutes celles et ceux qui lui ont fait confiance et l’ont quitté.

Nous n’avons pas le temps de construire la gauche de demain. Le temps presse : c’est celle d’aujourd’hui qui nous attend déjà ! La crise sociale, amplifiée par la catastrophe sanitaire, le désordre écologique de la planète, tout nous invite à aller plus vite, pour être au rendez-vous de l’Histoire qui s’écrit devant nous.

P. Eluard écrivait : « Il n’y a pas de hasard. Il n’y a que des rendez-vous. » Celui de la gauche et des écologistes est ici et maintenant.

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