Par Vautrin
Ça commence par une concertation ou , plus exactement, une apparence de concertation. Il s’agit,sous l’autorité d’un ancien sénateur RPR, de discuter de la situation des régimes de retraite et d’envisager les possibilités d’évolution.
Le missionnaire remet son rapport au terme de près de deux ans de travail. Le rapport est publié. Le MEDEF exprime sa satisfaction. Les syndicats révolutionnaires se braquent. Les syndicats réformistes se disent vigilants et rappellent les lignes rouges. On laisse filtrer dans la presse des indiscrets sur le thème « le président a compris le rôle majeur de la CFDT ».
Le missionnaire est nommé Ministre. Ou plus exactement il est nommé haut-commissaire. On connaît cela, les transfuges honteux n’aiment pas être nommés ministre, il leur faut un autre titre, n’est-ce pas Monsieur Hirsch ?
Toujours est-il qu’une fois le missionnaire nommé haut-commissaire, on constate que l’affaire n’est pas prête. Il faut donc repartir pour une concertation. On n’en connaît ni les termes ni le terme. On croyait que c’était le dossier volumineux remis par le missionnaire qui serait la base de cette nouvelle concertation. Il n’en est rien.
Certainement échaudé par les affaires de gilets jaunes et donc préoccupé par sa nouvelle posture d’homme de dialogue, inquiet de son positionnement de plus en plus droitier Macron est intervenu pour écarter l’une des principales pistes du rapport du missionnaire, l’âge pivot qu’on nous avait vendu comme l’alpha et l’oméga du nouveau système, est oublié.
Que reste-t-il du rapport du missionnaire ?
Nul ne le sait vraiment.
Que sera la réforme à venir ?
Nul ne le sait plus.
Peut-être n’y aura-t-il pas de réforme, il semble que ce soit la marque de l’acte deux de ce quinquennat de plus en plus chiraquisé; peut-être y aura-t-il une réforme a minima avec quelques coups de rabot sur les prestations visant bien sûr en priorité les fonctionnaires et les bénéficiaires des régimes sociaux; peut-être y aura-t-il une refonte complète.
À ce stade donc nous sommes dans l’incapacité de vanter ou de critiquer ce que sera la réforme des régimes de retraite que d’aucuns ont annoncé déjà comme étant un véritable big-bang
La seule chose certaine est qu’il faut tenir l’engagement de campagne de Macron puisque cela semble l’un des indicateurs majeurs de la réussite. Que disait-il ce programme ? une phrase simple « mise en place d’un système de retraites universel « avec des règles communes de calcul »
On ne parle pas d’équilibre des régimes, de poids des cotisations dans la masse salariale, de part des prestations de le PIB. Non. Seulement d’un régime universel avec des règles communes de calcul.
Universel ça voudrait dire pour tout le monde y compris ceux qui n’ont pas cotisé ou pas assez. Comme cela existe déjà avec le minimum vieillesse on aurait pu penser que cela irait au-delà. On a vu sur l’indemnisation du chômage que l’universalité promise par le candidat ne serait pas au rendez-vous. Le rapport de Delevoye ne permet pas de dire que cet engagement sera tenu.
Le rapport plaide lui pour un système « plus simple, plus juste et pour tous ».
Il faut donc que cela soit plus simple parce que trop de régimes c’est trop compliqué. Peu importe que 80% des retraités relèvent d’un seul régime. Il faut fusionner tous les autres. Et adopter des règles de calcul identiques. Ce sera le fameux point dont la valeur se substituerait au nombre d’années et surtout à la rémunération de référence de ces années
Le message est clair et tout ou presque est dit. Comme l’écrive les journaux « il y aura des gagnants et des perdants ». Le point pour tous au lieu des rémunération des années c’est la fin de la spécificité du régime des fonctionnaires. Le mode de calcul unique c’est la fin des régimes spéciaux. L’unification des taux c’est le holdup up sur les régimes autonomes des indépendants.
Il restera, c’est l’essentiel, l’instance de gouvernance comme on dit. Aujourd’hui la « gouvernance » joue sur les ajustements de taux de cotisation et les durées. Demain, sous la tutelle directe du ministère des finances, elle jouera directement sur la valeur du point. On nous dit aujourd’hui qu’elle sera sanctuarisée on voit bien que ce sera la variable majeure d’ajustement. D’autant que l’autre variable, l’âge pivot, a été abandonnée par Macron. On comprend que Delevoye en attendait beaucoup en terme de différé des départs en retraite.
On aurait pu pourtant parler de spécificités de notre régime de retraite : environ 2% de plus que la moyenne de l’Union, des transferts publics nettement plus important que pour cette moyenne et des taux de remplacement nettement inférieur à cette même moyenne.
On pourrait parler de spécificités du marché du travail français avec un taux d’emploi des séniors très faible ce qui laisse rêveur quant aux perspectives d’allongement de le durée de vie au travail. .
On pourrait parler des spécificités des prélèvements sur certains revenus, ceux du capital bien sûr mais aussi ceux des fonctionnaires puisque l’Etat s’exonère largement du paiement des cotisations retraites sur une part substantielle des rémunérations des fonctionnaires.
On pourrait parler de la pénibilité, chantier initié par le précèdent gouvernement et qui ne semble pas devoir connaître, malgré un chapitre poli du rapport Delevoye, de véritable prise en compte.
On pourrait parler de tout cela mais on préfère parler simplicité (au passage comment un système public de retraite peut-il être simple ?) et égalité (pourtant comment faire quand les âges de début et de fin de carrière diffèrent substantiellement, comment traiter les régimes complémentaires et la faiclité d’y accéder ?). On verra plus tard et ailleurs comment gérer les ajustements.
Et c’est bien cela le principal danger.