9 mai 2020

Rendre toute la culture au monde

Par Marie Grau

Première sortie, dernière à revenir, la culture est en profonde détresse face à la crise sanitaire et les annonces tardives du Président auront pour essentiel mérite de rassurer financièrement une partie des professionnels confrontés à d’incessants reports et annulations depuis plus de deux mois.

Ca ne suffira pas pour autant. La multiplicité des statuts – métiers – structures, propres au secteur et à ses industries, nécessiteront certainement d’autres aides, « quoi qu’il en coûte », pour secourir encore d’autres artistes et pour couvrir les frais fixes de nombreux lieux et activités qui ne sont pas entièrement subventionnés. Et malgré ces efforts, la culture restera en partie à terre tant que la distanciation sociale empêchera une immense part de ses entremêlements vivants entre artistes, techniciens, oeuvres, publics, émotions, découvertes.

Une société qui se voudrait plus forte « après » aurait pourtant tout intérêt à dépasser ces obstacles et s’appuyer sur une large émulation culturelle pour déconfiner les esprits, repenser les liens, décloisonner les habitudes, rendre plus rapidement une part de liberté au monde.

Une voie technique consisterait à consolider le foisonnement rapide et gratuit des offres en ligne déjà proposé par de très nombreuses structures (spectacles, musées, festivals…) en lui donnant une réalité numérique équitable. Ce cadre faciliterait notamment un accès matériel pour tous, une rémunération adaptée des acteurs, et une taxation globale des plateformes dont les intégrations au cas par cas sont fastidieuses et sources d’inévitables distorsions de concurrence.

Une voie parallèle indispensable devrait amplifier au plus vite les réouvertures progressives des lieux (librairies, médiathèques, galeries…) en les accompagnement de celles de tous les musées et monuments qui maillent notre territoire. Ces derniers disposent le plus souvent d’espaces vastes, balisables, et pour les plus importants de systèmes de réservations horaires gérant leurs flux. Sans la cohue des touristes, ils sont une véritable opportunité de visites pour de nouveaux publics de proximité et d’enseignements artistiques. Ils pourraient aussi, selon leurs possibilités, accueillir des artistes en résidence et au projet, faisant alors de cette période de suspension une occasion de malaxer les disciplines et la création.

Ces propositions ne répondront pas au problème saillant des salles de cinéma et de théâtres ni à celui de leurs lourdes productions.

Mais elles seraient un signe aux artistes et aux citoyens, pour rendre à la culture sa place intrinsèque.

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