Par Julien Dray
On a voulu tourner le dos et même tenter de stigmatiser, de discréditer voire de criminaliser un mouvement qui, en France, a démarré sur une mesure que l’on pensait anecdotique. On a voulu ignorer ce qui semblait un fatras de revendications iconoclastes et quelque fois radicales. Au mieux, on a fait semblant mais on n’a rien changé.
Ce que l’on a délibérément traité comme un simple épiphénomène a certes été affaibli mais il n’a pas disparu. Il s’est même étendu bien au delà de nos frontières. On fait ainsi référence au mouvement des Gilets jaunes dans nombre de ceux qui se développent dans le monde. Il a annoncé ce qui se passe partout. D’une ampleur inédite. Les radicalités populaires se mettent en marche contre « le système ». Radicalités des revendications contre « radicalisme des pouvoirs ». La révolte populaire part en guerre contre le capitalisme, contre toutes les formes de totalitarisme, contre le libéralisme économique.
Le nombre de pays qui aujourd’hui connaissent une révolte populaire ne cesse d’augmenter. Ces révoltes ont toutes des points communs et on ne pourra pas longtemps encore les ignorer. Du Chili au Liban, en passant par l’Equateur, l’Algérie et Hongkong, ce sont les mêmes mots qui reviennent : justice, corruption, démocratie, dignité, respect….
Aux quatre coins du globe, ce sont des petits riens qui ont déclenché la mobilisation des peuples. C’est bien que l’acceptation d’une fatalité imposée d’en haut arrive au bout. Que plus rien n’est supportable lorsque la vie et la dignité sont en jeu. Sa propre vie et celle de la planète. Sa dignité d’humain.
Chaque mouvement se nourrit des autres. Malgré la réticence de certains médias à informer en temps réel, la révolte s’étend. Les réseaux sociaux prennent le relais. Aujourd’hui tout le monde sait au Chili ce qui se passe au Liban et réciproquement. On se reconnaît dans les mêmes souffrances, dans les mêmes inégalités, dans les mêmes injustices. On se convainc, à travers l’autre de la légitimité de son combat.
« Si la jeunesse n’a pas toujours raison, la société qui la méconnait et qui la frappe a toujours tort » (François Mitterrand)
Oui, la jeunesse s’engage à nouveau, partout. Elle n’a pas de passé. Pas de crédit. Elle est libre de ses mouvements. Elle ne porte pas sur le dos le poids des échecs et des erreurs de ses ainés. On l’a condamnée sur l’hôtel du profit ? Sur l’hôtel de la croissance aveugle ? Sur l’hôtel de la finance ? la jeunesse réclame donc son droit à l’avenir. Elle le veut juste, prospère, heureux et respectueux.
Elle oppose sa fraicheur et sa détermination à la violence. Une violence qui elle aussi s’étend. La violence policière surtout.
Ce n’est pas uniquement le combat de la jeunesse, c’est celui de tous. Elle est cependant l’appel d’air, une force d’entrainement de la société. Elle la remobilise ! Elle témoigne de cette aspiration collective à une démocratie qui n’oublierait personne, à une liberté conquise en commun. Une fusion générationnelle s’opère sous nos yeux. Elle n’est pas confessionnelle, elle n’est pas arrimée à une quelconque idéologie, elle est le sursaut salutaire de la condition humaine !
Du côté des chancelleries ; est-ce la peur qui domine ? Tant les responsables politiques que l’ensemble des tenants du système sont encore dans la recherche de ce qui pourrait sauver leurs pouvoirs. Personne ne veut comprendre que l’histoire prend un virage. Que la direction qu’elle prend n’est pas celle qu’ils voulaient pour horizon. Un horizon…à courte vue.
La grande majorité des corps constitués, partout dans le monde, dans toutes les strates de leurs sociétés, qu’ils soient politiques, syndicaux, économiques, médiatiques ou financiers…. Rejette des mouvements hors circuits, des mouvements qu’ils ne peuvent contenir, maitriser avec leurs codes, avec leurs règles. Semblant incapables de se réinventer, ils mettent en place ou cautionnent de fait la répression. C’est l’impasse !
L’espoir est là pourtant ! Si l’on reconnaît que l’odeur de soufre que l’on sent aujourd’hui partout dans le monde est un tournant de l’Histoire. Il ne s’agit pas d’un concours de circonstances, pas davantage d’un hasard de calendrier. Il doit être le début d’une remise en question.
Il appartient aux forces du progrès de prendre ce virage imposé par les peuples. Une nouvelle opportunité s’offre à la Gauche pour construire des programmes politiques conquérants : proposer des mesures innovantes, comme nous l’avons fait sur les GAFA il y a plus de deux ans.
Il faut en finir avec la fatalité ! L’heure est à l’audace. C’est désormais possible !
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Bonjour,
Cette lettre est d’un très beau niveau, Merci !
MAIS
Car il y a un « mais »…. qui tient en un mot, révélateur, s’il en est : le mot « conquérant » (là où il est placé, car la conquête n’est pas en soi une mauvaise pensée)
Alors c’est donc cela : reprendre le pouvoir. La finalité, l »objectif. On écoute, certes, on analyse, certes, on élabore des stratégies, certes… Mais la finalité reste la même.
Si en lieu et place du terme conquérant, j’avais lu « ….construire des programmes politiques, une manière de penser nouvelle, destinées à proposer des mesures innovantes….. »
Alors j’aurai eu l’espoir que la finalité de ceux qui détiennent ou ont détenu un morceau de pouvoir était elle-même engagée dans un acte révolutionnaire.