Par Jérôme Grataloup
Après plus de 10 mois de mobilisation, et alors que les manifestations des gilets jaunes s’essoufflent et disparaissent, 4 français sur 10 continuent de soutenir le mouvement. De fait, la crise sociale est loin d’être résolue. Et ce n’est pas la consultation, lors du grand débat, des corps intermédiaires, qui a changé la donne.
Le malaise social français se ressent dans toutes les couches de la population, des classes moyennes aisées aux plus exclus en passant par les classes populaires. La réponse du gouvernement, ou plutôt l’absence de réponse concrète et la perpétuation des réformes sociales injustes, font de cette rentrée une poudrière et une porte ouverte aux mouvements extrémistes pour les prochaines élections municipales.
La consultation tardive des élus locaux, eux même fatigués de se battre seuls depuis des années contre l’abandon des services publics de l’état, n’aura pas suffi.
Le gouvernement continue par ailleurs ses réformes du modèle social français, qui d’ici quelques années n’aura plus rien d’exceptionnel ni de protecteur. Alors qu’il fut un bouclier contre les affres de la crise économique en 2008, Macron le détricote lentement, consciencieusement, et durablement.
Au menu pour cette rentrée « apaisée » : réforme de la fonction publique, réforme des retraites, et réforme de l’assurance chômage. Après une première année de mandat marquée par les cadeaux fiscaux aux plus riches tels que la flat tax et la suppression de l’impôt de solidarité sur la fortune, une deuxième année marquée par le resserrement des ressources aux collectivités locales, seules encore à même d’assurer une forme d’égalité sur le territoire, Macron attaque désormais sa troisième année avec des réformes tous azimuts, dont les plus pauvres seront encore les grands perdants.
La réforme de la fonction publique votée cet été prévoit notamment l’élargissement du recours au contrat, qui fragilise encore le statut des fonctionnaires, l’encadrement du droit de grève, ou encore une rupture conventionnelle. Et ce alors même que les premiers retours du secteur privé nous indiquent que 44% des ruptures conventionnelles s’effectuent dans le cadre de situations conflictuelles avec l’employeur. Le gouvernement souhaite également faire l’économie de 70 000 postes dans la fonction publique territoriale, la seule à comprendre près de 76% de catégories C pour seulement 10% de A et 15% de B.
Pour gagner 3 milliards d’euros d’ici 2021, et sans accord des partenaires sociaux sur la question, le gouvernement va également réformer l’assurance chômage. La durée de cotisation devra atteindre 6 mois et non plus 4, sur une période de 28 mois et plus 24, alors que le salaire de référence sera déterminé sur les 24 derniers mois et plus sur 12. Selon l’Unedic, 1 million de personnes devraient voir leurs allocations diminuer.
La réforme des retraites prévoit quant à elle un passage à un système de retraite par points. Alors que les allongements successifs de durée de cotisation, votés depuis plusieurs années, devaient permettre à eux seuls de remettre le régime de retraite à l’équilibre, le Président veut aller encore plus loin. A ce compte la, les régimes spéciaux et autonomes devraient disparaître, l’intégralité de la carrière être prise en compte pour le calcul de la retraite et la durée de cotisation s’allonger. L’âge de départ à la retraite n’est pas un sujet nous dit-on, mais quand même, pour avoir une retraite à taux plein, il semble qu’il faudra bien attendre d’avoir au moins 64 ans.
La crise des hôpitaux, qui succède à la crise dans les EHPAD, reste pour sa part sans solution. Pas d’urgence semble-t-il à réformer les urgences et à leur donner les moyens de réellement aider et accompagner les Français les plus en difficulté.
Si les forces politiques et syndicales n’arrivent plus à mobiliser, force est de constater que cela relève presqu’exclusivement d’une perte d’influence des modes traditionnels de contestation, mais en aucun cas d’un recul des inquiétudes et des critiques de la population française, notamment sur le plan social.
A nous dès lors de proposer de nouvelles formes d’engagement pour répondre à ces attentes.