Par Julien Dray & Daniel Goldberg
Du Chili en Algérie, du Liban en Équateur, en passant par Hong-Kong, partout les peuples veulent reprendre en main leur propre vie, et par là-même la destinée de leur pays, voire de la planète entière.
Le reflux de la vague libérale autoritaire en œuvre depuis des années est manifeste à un moment où les urgences sociales rencontrent partout les défis climatiques et les exigences démocratiques. Fin du mois, fin du monde et faim démocratique se conjuguent désormais au présent et au pluriel, dans des mouvements d’ensemble souvent joyeux, partout déterminés, radicaux au sens où les compromissions et les « un pas en avant, deux pas en arrière » ne sont plus acceptés, des mouvements presque toujours réprimés le plus durement.
Ils se combinent entre eux et, sans être réellement coordonnés. Ils puisent leurs énergies les uns dans les autres et retournent pour la première fois les outils de la mondialisation dans un but de profit collectif et partagé.
Nous le disions ici l’année dernière : les actions des Gilets jaunes parlaient de cela aussi. Sans en être précurseures, elles ont participé à la même vague. Car derrière les dévoiements de ce mouvement et les violences condamnables, émergeait au fond une volonté de changer un ordre établi qui permet aux plus aisés de profiter de conditions de vie au détriment des classes moyennes et populaires écrasées par la violence de la crise mondiale, le seul réel pillage des richesses toléré étant celui des ressources de la planète.
Cette première internationale citoyenne du 21ème siècle ne sera pas victorieuse par nature, sans effort de construction politique utile et efficace. D’abord les forces de la mondialisation libérale aujourd’hui sur le reculoir ont tout à perdre de ces mouvements : elles vont donc chercher à les contenir par tous les moyens, ayant oublié les vertus des compromis passés au lendemain de la seconde guerre mondiale. Et puis les forces de moins en moins obscures propageant la haine et le rejet de l’autre sont à la manœuvre, dans bien des pays et ont pris des positions dominantes en Hongrie, aux Brésil et, d’une certaine manière, aux États-Unis, continuent de s’enraciner en Italie, en Allemagne et aussi en France.
Aussi, la période commande d’agir, de faciliter, d’aider à se construire, à progresser ces mouvements planétaires qui misent tout sur le progrès partagé. Non pas de penser en prendre la direction, comme l’ont maladroitement essayé certains l’année passée, au point de les affaiblir.
À trop les observer de loin, pensant peut-être récupérer « proprement » leur énergie ou leur soutien le moment venu sans se frotter réellement à leurs revendications, ce qui reste des formations de la gauche politique, syndicale et associative ferait une erreur définitivement mortifère. D’autant que, dans notre pays, il est plus que probable que ces mouvements trouvent de nouveau d’ici peu une expression tangible et de nouvelles mobilisations.
Au contraire, il faut prendre ses responsabilités.
Face à un pouvoir assez cynique pour promouvoir – jusqu’à l’extrême-droite – la triangulation permanente comme seule boussole et découper la société en parts de marché, la réinscription des urgences sociales, environnementales et démocratiques dans des revendications fortes et rassembleuses est toujours possible. Elles auront d’autant de force qu’elles seront portées ensemble par celles et ceux qui veulent incarner une alternative.
Oui, il faut courir, camarade, car « le vieux monde est tout prêt à agoniser. »*
* Paroles d’Alex Beaupain
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