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Par Edmond Thanel
La législative partielle, dans la première circonscription de l’Essonne, est révélatrice de plusieurs phénomènes à analyser bien au delà des enjeux locaux.
Si l’on ne regarde que le résultat, en pourcentage, la victoire de Francis Chouat, soutenu par LREM et l’ensemble des maires de droite de la circonscription, est éclatante : 59,1% contre 40,9% pour son adversaire du deuxième tour, Farida Amrani, candidate de la France Insoumise. Disons le tout de même ; la démocratie, dans cette élection particulièrement mais également dans toutes celles qui ont eu lieu ces derniers mois, est bien malade.
La véritable interrogation dans l’Essonne ce dimanche, c’est en effet, très largement, l’abstention : 82,4%
Une multitude de questions se posent. Certaines ont des réponses immédiates, d’autres pas. Un certain nombre de constats peuvent également être posés en commençant par la stratégie de celui qui remporté cette élection.
La droite, de LREM à LR, a joué la carte de l’intérêt d’élus locaux, travestissant de fait l’enjeu du scrutin ; on le constatera dans les prochaines semaines quand le jeu des chaises musicales confirmera la répartition territoriale des responsabilités et donc le contenu idéologique.
Le candidat d’Emmanuel Macron a, de fait, « municipalisé » un scrutin national. Il l’a donc volontairement dépolitisé.
La fusion de deux communes (Evry et Courcouronnes) a servi de base à une campagne moins législative que locale. Le soutien de la totalité des maires de droite a été obtenu, non sur un consensus idéologique mais dans le cadre d’une négociation entre le nouvel adhérent de LREM et la droite locale : « Je prends le mandat de député en échange de celui de maire, de responsable d’agglomération, de telle ou telle structure sur le territoire de la circonscription ».
Ce mélange des genres a créé, à dessein, de la confusion et cette confusion n’est pas étrangère au désarroi électoral. La politique et l’idéologie ont été mises au second degré.
La gauche, quant à elle, divisée comme jamais au premier tour, a sans doute participé, malgré la grogne, l’exaspération, la colère populaire constatée partout et auquel le territoire Evryen n’échappe pas, à éloigner un peu plus les citoyens des urnes.
Il apparaît par ailleurs clairement qu’aucun candidat de gauche n’a proposé un projet qui donne envie. On peut de ce fait regretter que La direction du PS ait choisi de ne pas présenter de candidat dans une circonscription historiquement socialiste. N’aurait-ce pas été un premier pas de reconquête ?
A la dispersion du premier tour, et alors même que l’entente cordiale de la droite faisait front, s’ajoute, à l’entre deux tours, d’une part les atermoiements de la gauche à choisir son camp et d’autre part une diabolisation de la candidate FI orchestrée par certains groupes d’influence. Cela a évidemment contribué à déstabiliser un peu plus un électorat en perte totale de confiance dans ce moment de crise sociale : il n’avait pas besoin de ça.
Le constat est édifiant : Nous ne savons plus, à gauche, répondre aux attentes de la population. La colère ne s’exprime d’ailleurs plus à l’occasion des élections mais dans la rue.
Le pouvoir actuel a exacerbé le sentiment d’inégalité, d’iniquité. Les classes moyennes et populaires subissent à eux seuls une politique sociale et fiscale injuste, souvent injustifiée, et pourtant ils ne trouvent pas à gauche un quelconque espoir. En Essonne, ce dimanche ils l’ont fait savoir par la désertion.
La gauche traditionnelle ne fait plus recette. Elle porte en elle le sentiment d’un échec à changer la vie. Elle ne convainc plus sur sa volonté d’associer le pragmatisme et la défense de notre modèle social. Elle apparaît comme assimilable, conforme, compatible à un modèle libéral qui favorise toujours les mêmes. C’est moins le fond, auquel on ne croit plus, que la forme qui est jugée sévèrement. Sans propositions claires, sans perspective identifiable par l’ensemble des citoyens, la gauche « traditionnelle » n’a plus de prise ; elle s’éloigne de classes moyennes et populaires ; elle n’est aujourd’hui plus une solution face à ce nouveau front populaire. Tout cela a un impact dans les territoires et se traduit par une démobilisation inquiétante.
La gauche dite « radicale » a répondu un temps à une quête d’espoir. Son discours a réveillé quelque peu l’instinct de révolte, de revendication, de confrontation auquel s’était substitué le fatalisme. Elle n’apparait cependant pas, auprès des électeurs, comme une solution suffisamment rassembleuse pour franchir une nouvelle étape. La France Insoumise semble se heurter à un plafond de verre.
L’union de la gauche que nous avons ici prônée, a, paradoxalement pour cette élection, ajouté à la confusion. Les reports de voix ont été très faibles. La mobilisation ne s’est pas renforcée.
Il faut prendre acte de ce que la gauche « traditionnelle » et la gauche plus « radicale » ne soient plus, dans leurs formes respectives actuelles, assimilables entre elles. C’est un élément nouveau qu’il nous faut analyser en profondeur. Une remise en question générale est donc nécessaire, des deux côtés !
La gauche, dans son ensemble, en Essonne comme ailleurs, doit prendre l’initiative, retrouver le chemin du dialogue, associer ses différences sans les effacer, clarifier surtout son positionnement.
Il faut à nouveau inventer, réfléchir et proposer des choses concrètes. Pour ne donner qu’un exemple la dotation universelle pour chaque jeune prélevée par une taxe sur les GAFA parle bien davantage à cette tranche de la population que toutes les théorisations idéologiques.
La gauche doit en outre reprendre le combat culturel et idéologique. Mais, c’est à partir de l’expression citoyenne qu’elle doit construire des projets mobilisateurs, formuler des propositions simples et claires, compréhensibles au plus près du terrain ; des propositions que pourront s’approprier tous ceux qui aujourd’hui ne savent plus comment dire leur exaspération, leur sentiment d’abandon ; le manque de solidarité, de justice, de services publics qu’ils ressentent cruellement et qu’ils subissent au quotidien.
L’Essonne est sans doute un des départements qui peut beaucoup apporter à la gauche. Elle a été longtemps un laboratoire d’idées inspirées et inspirantes. Elle a donné nombre de concepts et aussi nombre de personnalités devenues des références nationales. L’Essonne, la rebelle, l’insolente, a autrefois permis au parti socialiste de se montrer dans toute sa diversité. Les débats passionnés en son sein ont toujours trouvé des issues positives.
Mais l’Essonne a aussi été le lieu de multiples controverses, animosités, ruptures qui ont finalement eu raison de l’unité du PS, tant au niveau local que national.
Jean-Luc Mélenchon, Benoit Hamon, Manuel Valls, Marie-Noëlle Lienemann, Jérôme Guedj, Thierry Mandon, Julien Dray sont tous issus de cette fédération singulière. Si certains ont probablement définitivement tournés le dos à une gauche de combat et de rassemblement en regardant vers la droite -c’est le cas de ceux qui ont choisi de rejoindre Emmanuel Macron directement ou indirectement- la majorité d’entre eux représente encore ce qui fait le fondement de la gauche des solidarités, de la justice sociale, fiscale, environnementale !
Le premier réflexe serait donc de penser qu’il leur faudrait se retrouver pour donner un nouveau souffle à leurs valeurs communes. Cela ne sera cependant pas suffisant. Il serait temps par contre qu’ils sortent de leur bunker pour regarder les français, les yeux dans les yeux, ensemble !
La gauche en Essonne, à travers cette élection, a montré, peut-être, le pire d’elle-même. Pourtant, elle révèle une fois de plus par l’analyse de ce résultat législatif, qu’elle a des clefs pour se réinventer et renouer avec les classes moyennes et populaires.
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