15 mai 2018

Réussir le 26 mai pour sortir des ambiguïtés

Par Daniel Goldberg

Cheminots, agents des trois fonctions publiques, salariés des Ehpad, étudiants et enseignants, beaucoup des femmes et des hommes qui ont fait dans le passé la base sociologique et électorale du Parti socialiste sont appelés à se retrouver samedi 26 mai pour une « grande marée populaire » à l’invitation de son initiateur, François Ruffin.

La question posée maintenant au Parti socialiste est simple : doit-il ou non revendiquer sa place dans ce type d’initiative d’opposition à E. Macron ?

Certes, la prudence commande d’attendre les mots d’ordre de cette nouvelle manifestation et de refuser toute récupération politique du mouvement social. Néanmoins, qui peut penser que le PS est aujourd’hui en situation de récupérer quoi que ce soit ? Et en quoi cette prudence revendiquée peut-elle être porteuse d’avenir ?

Être pleinement d’une gauche pleinement réaliste consiste aujourd’hui à renouer les liens avec celles et ceux qui subissent de plein fouet les choix actuels, à affirmer une opposition claire sur le terrain, dans les mobilisations qui se font jour, y compris pour en refuser certains excès, et à proposer un mouvement à vocation majoritaire dans le pays.

Bref, le rôle du Parti socialiste est de participer à construire une véritable alternative politique qui passera à coup sûr par un dépassement de ce qu’il est encore et de ses structures actuelles.

Si le Congrès d’Aubervilliers a permis aux socialistes de se parler entre eux, il est plus que temps qu’ils reparlent aux Français, sans attendre un hypothétique retour de balancier lors des élections locales.

Pour cela, il est nécessaire de dissiper le flou qui rend le Parti socialiste politiquement insaisissable – au sens premier du terme – pour nombre de nos concitoyens. Dans cette situation d’atomisation de la gauche, le Cardinal de Retz doit être cette fois-ci contredit : sortir de l’ambiguïté serait un avantage pour le PS, sauf à dépendre d’un bilan du quinquennat jamais digéré et toujours repoussé.

Le Parti socialiste a pu, pendant des années, vivre, contrairement aux partis sociaux- démocrates européens, sans liens forts avec les mouvements sociaux grâce à son ancrage territorial et ses relations avec les milieux associatifs ou intellectuels, dans une sorte de traduction politique de mouvements dans lesquels il n’était pas, en tant que tel, partie prenante.

Aujourd’hui, alors qu’il n’a plus les uns ni les autres, c’est sa légitimité d’outil au service de l’émancipation économique et sociale des classes moyennes et populaires qu’il a à reconquérir.

Et, alors qu’Emmanuel Macron dévie de la trajectoire centrale que lui avait confiée les Français vers un libéralisme économique sans retenue et un vrai centralisme démocratique (!), si le Parti socialiste n’imprime pas clairement sa marque, ses mots d’ordre, ses revendications et ses propositions, c’est alors la question simple de son utilité qui sera posée.

Ainsi, s’il se confirme que le 26 mai sera l’occasion de manifester pour « l’égalité, la justice sociale et la solidarité » comme cela est dit aujourd’hui, le Parti socialiste y a toute sa place et doit affirmer sa volonté d’en être partie prenante, pleinement et sereinement.

Il peut alors s’adresser aux principaux organisateurs pour indiquer vouloir participer à sa préparation, sans autre condition que le fait que ceux-ci s’engagent eux-mêmes à accepter cette participation. A eux-aussi se posera alors la question de sortir des ambiguïtés du type « ni Macron, ni PS » qui conduisent à une forme d’impuissance finalement confortable face au libéralisme qui veut s’étendre à tous les pans de la vie sociale.

Justement, il y a 221 ans exactement, le 26 mai 1797, s’achevait le procès de Gracchus Babeuf, condamné à mort suite à la Conjuration des égaux un an plus tôt.

Il ne s’agit pas ici de magnifier le programme développé par ces précurseurs de mouvements révolutionnaires futurs. Mais, souvenons-nous néanmoins que Babeuf et les siens défendaient une « révolution pacifique » face au pouvoir exécutif confié au Directoire qui représentait la riche bourgeoisie de l’époque et composait, par le rétablissement du suffrage censitaire, des assemblées par avance acquises.

Néanmoins, contesté à la fois par les monarchistes et les jacobins, le Directoire – qui rebaptisera la Place de la Révolutionen Place de la Concorde -amènera finalement Napoléon Bonaparte au pouvoir.

Ainsi, faute d’avoir su créer les conditions d’une action majoritaire, tant les Égaux qui combattaient la propriété privée que ceux qui ont recherché une stabilité sociale du pays en confiant sa direction à un nombre restreint de dirigeants coupés des aspirations populaires, tous ont échoué.

L’Histoire nous tend parfois des miroirs pour méditer et agir.

Daniel Goldberg  

 

 

 

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